Notre interprétation de l’œuvre
Après avoir chanté durant plusieurs années le « Canto General », grand oratorio populaire de Mikis Theodorakis, notre chœur a gardé une attirance pour l’écriture musicale, la force expressive du compositeur. Or, il y a quatre ans, l’œuvre de « Zorba il Greco » est parvenue à Rodolfo Lahoz sous la forme d’un conducteur offert par l’auteur lui-même. Mikis Theodorakis avait écrit cette œuvre en 1988, à partir du roman de Kazantzaki et bien après la musique du célèbre film Zorba. Il s’agissait d’une suite-ballet en deux actes commandée pour le festival des Arènes de Vérone. Fasciné par les mélodies qui l’habitent et le contenu dramaturgique, Rodolfo Lahoz a travaillé à partir du conducteur de façon à valoriser les chants donnés au chœur, tout en gardant l’essentiel de l’écriture d’orchestre avec une formation de chambre (piano, harpe, violoncelle, deux flûtes, deux mandolines, trompette et deux percussions).
Ainsi, le chœur et le petit orchestre ont-ils travaillé les arrangements proposés, sous forme d’ateliers, afin de trouver une adaptation respectueuse de l’œuvre originale. La partie du chœur a été complétée par des transcriptions que Rodolfo a aimé réécrire à partir de quatuors ou sextuors donnés au départ à un orchestre à cordes ou à l’orchestre d’harmonie. Aussi, le chœur retrouve-t-il une partition complète et des rapports fusionnels avec les instruments solistes.
A travers les mélopées, les thèmes d’une grande puissance émotionnelle et les danses, « Zorba » nous amène le parfum de la mer et des montagnes grecques. Ce poème symphonique est dédié aux hommes, à une culture ancestrale qui porte la flamme méditerranéenne, la force du passé. « Zorba » est un hymne à la Grèce et à la mer, hommage du musicien à son père d’origine crétoise, aux îles grecques, échouées au milieu de la Méditerranée. « Zorba » est la Grèce, homme, femme, arbre, terre. On y retrouve les mythes grecs car Zorba appartient au dieu Dionysos fêté dans les chants du final. Mais le sens de l’œuvre est universel avec le jeu éternel entre la vie et la mort, entre l’amour et la haine, entre le désespoir et l’espérance.
Dans cette version, le Chœur devient le peuple, le conteur de cette histoire. Traité comme un chœur d’opéra ou bien un corps de ballet, il tient un rôle central. Un important travail de mise en espace et de chorégraphie a permis de bâtir un canevas théâtral et musical traduisant le sens des mots à travers le geste et la voix.
Comme pour chaque concert choral des Polyphonies à Eysines, d’autres créations artistiques viennent appuyer le chant pour servir la musique et le message qu’elle porte. Une mise en espace du chœur a été conçue à partir du conducteur d’orchestre. La musique remplie d’images devient la mer, le ciel étoilé, une lutte, un orage, un geste vers l’autre, un regard vers le public, la conviction d’une histoire qu’on raconte. Cette mise en scène ou spatialisation des voix est l’œuvre de Denise Laborde, musicienne et comédienne. Amie des Polyphonies à Eysines depuis des années, elle propose un travail théâtral très juste et bien adapté à notre chœur, complété par la chorégraphie imaginée par Sylviane Victoria. Autour de cette musique, les images d’Anne d’Aressy permettent de visualiser les scènes de cette histoire, les jeux entre la vie et la mort. La poésie et la dramaturgie de « Zorba » apparaissent dans les toiles, dans les attitudes de scène, dans les recherches de couleurs, d’ombres et de lumières qui appellent le regard. L’association Polyphonies à Eysines a également donné la possibilité à Tristan Lahoz, étudiant en stylisme-mode, de faire une recherche sur les accessoires de scène.
Entourés d’une équipe technique et artistique formidable, nous avons le bonheur de présenter cette création sur la musique de Mikis Theodorakis qui intègre merveilleusement les thèmes de la musique populaire grecque dans la musique symphonique.
Rodolfo LAHOZ Marie-Claire PRAT
Directeur artistique Présidente des Polyphonies